Grandes inquiétudes

Fissures, affaissements, évacuations… Depuis plusieurs semaines, les travaux de creusement de la future ligne de métro à Toulouse suscitent l’inquiétude des riverains. En cause : les conséquences visibles du passage du tunnelier, qui progresse à environ 20 mètres de profondeur sous la ville.

En juillet, deux habitations ont été évacuées en urgence après la découverte d’une cavité de 25 mètres de profondeur. Des fissures déjà présentes sur les murs de certaines maisons se sont brutalement aggravées. Quelques mois plus tôt, le rez-de-chaussée d’un logement s’était partiellement effondré, provoquant une vague d’alerte dans le voisinage. Depuis le lancement du chantier, une dizaine de logements ont été évacués, et plus de 30 personnes relogées temporairement.

Ces incidents ne sont pas totalement inattendus pour les spécialistes. Le sous-sol de Toulouse est reconnu pour sa complexité géologique, notamment en raison de la présence de poches de sable très localisées, susceptibles de provoquer des affaissements soudains.

    « Vous pouvez réaliser un sondage à un mètre d’une poche de sable sans jamais la détecter », explique Jean-François Lacroux, directeur général de Tisséo Ingénierie, en charge du projet.

Tisséo indique avoir respecté, voire dépassé, les recommandations techniques en matière d’études de sol. Mais certains experts indépendants appellent à une révision des pratiques.

    « Les sondages géotechniques sont effectués tous les 40 mètres environ. C’est insuffisant dans des zones sensibles. Il faudrait densifier ces relevés pour mieux anticiper les aléas », souligne Martin Emmanuel, pathologue du bâtiment.

Pour les riverains concernés, la situation est source d’inquiétude. Certains, comme Céline, n’ont pas été évacués mais observent l’apparition de fissures sur leur maison. D’autres, comme Rodolphe Arthaud, pointent un manque de réactivité après les premiers signaux d’alerte.

    « Quand les premières fissures sont apparues, on aurait pu décider de mener des sondages supplémentaires ou d’évacuer temporairement. Au lieu de ça, le rez-de-chaussée de ma voisine s’est effondré deux mois plus tard », regrette-t-il.

Face à ces événements, Tisséo a annoncé le renforcement du dispositif de suivi sur le tracé : ajout de capteurs, contrôles topographiques plus fréquents, et communication renforcée auprès des habitants. L’opérateur rappelle toutefois que le « risque zéro » n’existe pas sur ce type de chantier en milieu urbain.

Le creusement de tunnels en milieu urbain reste une opération délicate, même encadrée par les meilleures pratiques. La situation toulousaine rappelle l’importance d’une veille géotechnique renforcée, d’une gestion proactive des désordres et d’un dialogue constant avec les riverains, indispensables pour mener à bien ce type de projet structurant sans compromettre la sécurité du bâti existant.

Sponsor d'Intertas.info, qui nous permet de vous informer